Vie syndicale

Retraites complémentaires : Les cadres exigent une nouvelle négociation

27 nov 2018

Effective au 1er janvier 2019, la fusion Agirc-Arrco impactera inévitablement les cadres.


Depuis cfdt.fr - Publication du 15/11/2018

Retraites complémentaires : De nouvelles règles en 2019

À compter du 1er janvier 2019, les personnes qui souhaitent faire valoir leurs droits à la retraite devront se familiariser avec la notion de coefficient de solidarité. En attendant une nouvelle négociation…

Les premières discussions sur la création d’un système universel de retraite feraient presque oublier que le système actuel continue de se réformer selon son propre agenda. Au 1er janvier 2019, la réforme des retraites complémentaires des salariés du privé, décidée par un accord des partenaires sociaux en octobre 2015, entrera pleinement en vigueur. Premier changement important : l’Agirc (complémentaire des cadres) va fusionner avec l’Arrco (ensemble des salariés). Cette fusion constitue l’aboutissement d’un travail mené depuis des années par les partenaires sociaux pour unifier les règles des deux régimes afin de faciliter la gouvernance du système et renforcer sa solidité financière. Le nouveau système, baptisé Agirc-Arrco, prévoit les mêmes règles pour tous les salariés du privé, quel que soit leur statut. Cela concerne 18 millions d’actifs, 12 millions de retraités et représente au total près d’un quart du montant des retraites versé en France, soit 75 milliards d’euros d’allocations. À noter que les retraites complémentaires représentent en moyenne 30 % de la pension d’un ouvrier contre 55 % de celle d’un cadre.


Coefficient de solidarité, késaco ?

Deuxième changement marquant, la création d’un coefficient de solidarité pour faire face à l’impasse financière dans laquelle risquaient de se retrouver les régimes à court terme avec l’arrivée massive des baby-boomers. Concrètement, une personne qui souhaite partir à la retraite au moment où elle atteint l’âge du taux plein subira une amputation de 10 % de sa pension complémentaire pendant trois ans. Si elle décide de prolonger son activité un an, cette mesure s’annule. Enfin, si elle prolonge de deux ans, elle verra sa pension bonifiée de 10 % pendant un an, 20 % si elle prolonge trois ans. Les futurs retraités très modestes susceptibles de bénéficier d’une exonération de CSG ou d’une CSG à taux réduit ne sont pas concernés par cette mesure, ni les retraités handicapés (50 % d’incapacité) ou ceux qui ont des enfants handicapés à charge. Pour la CFDT, ce mécanisme mis en place en vue de faire face à l’urgence n’a pas vocation à durer dans le temps. Il sera sans nul doute au cœur des prochaines discussions qui devraient se tenir en fin d’année.


La situation financière des régimes s’est améliorée

« Grâce aux efforts demandés aux salariés et aux retraités dans l’accord de 2015, la situation financière des régimes s’est nettement améliorée, explique Frédéric Sève, secrétaire national chargé des retraites. Nous souhaitons donc nous remettre autour de la table avec le patronat et les autres organisations syndicales afin d’adapter les règles du nouveau régime à cette embellie. »

Mais les discussions à venir ne devraient pas se limiter au coefficient de solidarité. En 2015, un ensemble d’efforts qu’il serait fastidieux de lister ici ont été décidés. Les entreprises comme les actifs et les retraités ont été mis à contribution. L’idée aujourd’hui pour la CFDT, en accord avec les autres organisations syndicales signataires du texte de l’époque (CFTC et CFE-CGC), est de renégocier un nouvel accord avec le patronat. « En matière de retraites complémentaires, nous avons toujours eu une attitude responsable et pragmatique, résume Frédéric Sève. Lorsque la crise économique associée à un déséquilibre démographique a nécessité des mesures difficiles, nous n’avons pas eu peur de prendre nos responsabilités. Aujourd’hui, alors que la situation économique s’améliore, nous sommes tout aussi déterminés à obtenir un juste retour des efforts consentis. »

jcitron@cfdt.fr


Les cadres exigent une nouvelle négociation

La fusion Agirc-Arrco au 1er janvier 2019 impactera inévitablement le statut des cadres. Et pour cause, la notion d’encadrement – qui n’est pas définie dans le code du travail – repose jusqu’à présent sur la convention fondatrice de l’Agirc datant de 1947. Lors des négociations de 2015 sur les retraites complémentaires (qui ont entériné le principe de fusion de l’Agirc et de l’Arrco), les partenaires sociaux s’étaient mis d’accord pour ouvrir une négociation nationale afin de redéfinir la notion d’encadrement. Des discussions ont bien été entamées à la fin 2017 mais sont finalement restées en suspens, le Medef n’étant manifestement pas pressé de se mettre au travail.

« Les discussions devraient reprendre d’ici à la fin de l’année », espère le secrétaire général de la CFDT-Cadres, Laurent Mahieu. Première organisation syndicale dans l’encadrement, la CFDT espère convaincre le patronat de mener à son terme la négociation et faire ainsi avancer le dossier. Et souhaite saisir l’opportunité de ce rendez-vous paritaire pour réviser la convention de 1947 et moderniser l’accord de 1983. « Les parcours professionnels des cadres ont bien changé depuis cinquante ans : les carrières sont plus fragmentées, les jeunes diplômés éprouvent des difficultés à accéder au statut de cadre et les seniors à se maintenir en emploi. C’est pourquoi il est important de redéfinir les missions des cadres à l’échelle nationale, insiste Laurent Mahieu. À partir de cette définition commune, les particularités et spécificités professionnelles pourraient faire l’objet, dans un second temps, de négociations de branches. »

La CFDT espère également associer à cette nouvelle définition de l’encadrement des droits spécifiques comme la garantie d’une marge de manœuvre dans les décisions prises au sein des entreprises, un droit d’expression, un droit d’alerte, un droit de retrait, un droit à la démission légitime. À défaut d’accord d’ici au 31 décembre 2018, les dispositions de la convention de 1947 continueront de s’appliquer. La notion d’encadrement ne disparaîtrait donc pas, même si, déplore la CFDT, « continuer à définir la fonction de cadre uniquement via les cotisations spécifiques (Apec, prévoyance) serait extrêmement réducteur et ne tiendrait pas compte de la réalité de la fonction ».

cnillus@cfdt.fr 

+ d'infos      

[Négociation encadrement] Accord de 1983 : appui et enjeu de modernisation

Manifeste des droits et garanties attachés à la fonction cadre

 

Photo : © R Gaillard / Réa