Emploi et compétences

La rupture conventionnelle, une innovation sous évaluation

30 aoû 2012

Un mode de rupture, hors motif économique, qui évite de contourner les règles ou de dégrader la relation salarié-employeur.


L’accord national interprofessionnel de modernisation du marché du travail du 11 janvier 2008 a créé la rupture conventionnelle. En tant que signataire de cet accord, la CFDT a souhaité en 2010 savoir comment la rupture conventionnelle était vécue par les salariés. Elle a confié cette étude au Centre d’études de l’emploi (CEE). Pour pouvoir réaliser cette enquête, il était nécessaire d’obtenir l’accès aux salariés concernés. Après une discussion avec la Dares (ministère du Travail), il a été possible de convenir que ce travail serait en fait préliminaire à une grande enquête menée en ce moment auprès de 3 000 salariés ayant signé une rupture conventionnelle en mai 2011 et dont les résultats sont attendus pour décembre 2012. Les analyses, conclusions et propositions formulées dans ce rapport sont formulées en toute indépendance par les chercheurs du CEE et n’engagent bien sûr pas la CFDT.

Pour autant, la CFDT trouve ce rapport du CEE très intéressant à plusieurs titres :

  1. Il permet de valider un questionnaire d’enquête directe auprès de salariés sur un sujet nouveau où tout était à construire et permet de recueillir des données qualitatives inexistantes jusqu’à présent.
  2. Il construit une modélisation à partir de 41 indicateurs en sept configurations-type. Cette modélisation qui s’appuie sur l’idée « s’il n’y avait pas eu de ruptures conventionnelles, quel autre mode de rupture existant du CDI aurait pu être utilisé » nous semble pertinente et pourra servir de base à l’analyse des données que la Dares collecte en ce moment.
  3. Il présente 101 monographies de situations réelles, qui, si elles ne sont pas nécessairement scientifiquement représentatives (l’enquête Dares le confirmera ou non), sont descriptives du monde du travail réel.
  4. Il démontre un fort taux de satisfaction des salariés devant cette modalité ; a contrario il confirme la représentation très négative pour les salariés du licenciement.

Sur les pistes d’évolution avancées par le CEE, la CFDT rappelle que :

  • La rupture conventionnelle n’a jamais eu pour seul objectif d’améliorer la démission et de favoriser les mobilités choisies. Ce nouveau mode de rupture vise à répondre à toutes les formes de ruptures du CDI, en dehors des motifs économiques, qui ne trouvent pas de solutions faute de disposer des motifs pour réaliser la rupture, sauf à contourner les règles existantes ou à prendre le risque d’une dégradation sensible des relations entre salarié et employeur. Dans ce sens, l’enquête révèle que pour 71 des 101 salariés interviewés, la rupture conventionnelle a été une solution, certes pas nécessairement idéale, mais « moins pire » que toutes les autres.
  • La rupture conventionnelle s’inscrit malheureusement dans un paysage où le dialogue social trop peu développé, notamment dans les TPME, ne permet souvent pas aux salariés de voir leurs difficultés réglées par des voies de discussion collective. Les évolutions des modes de représentativité des salariés dans les TPE et la rénovation des IRP doivent permettre de répondre à certaines situations de salariés qui aujourd’hui ne trouvent pas à se régler en maintenant le contrat de travail.
  • L’information des salariés sur la rupture conventionnelle reste un enjeu important pour lever certaines des difficultés repérées.
  • Le renforcement du contrôle par les Dirrecte doit être envisagé ; pourquoi ne pas prévoir une règle du genre, contrôle approfondi pour une rupture conventionnelle sur 10 dans chaque unité territoriale ?
  • La question de l’anti datage fréquent relevé dans l’enquête doit aussi être examinée. La solution proposée visant l’introduction d’un délai de 8 ou 15 jours consécutifs à l’homologation peut s’envisager sauf si le salarié reprend un emploi dans la foulée.

Dans l’attente des conclusions de l’enquête Dares, la CFDT verse ce rapport du CEE au débat qui doit s’ouvrir entre les partenaires sociaux pour faire le bilan de l’accord national interprofessionnel et le communique au gouvernement ainsi qu’à la presse.

Déclaration de Laurent Berger, secrétaire général adjoint de la CFDT

 

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