Revue Cadres n°437. Travailler après 50 ans

Novembre 2009


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Serge Guérin

Vitaminer l’emploi des seniors. Quelques pistes pour changer de culture

La réintégration des seniors dans l’entreprise est un des enjeux essentiels des années à venir ; la contrainte démographique peut constituer un levier pour réaliser une société plus douce à vivre pour tous les âges. Certes, les représentations restent fondamentalement négatives vis-àvis de l’âge et si l’on assiste progressivement à une prise de conscience du caractère inéluctable de l’allongement de la durée d’activité, il existe un fossé entre cette analyse et l’action qui devrait en résulter. Pourtant, il est possible de mener des politiques actives et efficaces. Il faut cependant accepter que l’intergénérationnel ne soit pas spontané et nécessite un travail préalable. L’échange entre générations, entre personnes différentes n’est pas une donnée « naturelle » mais un construit social qui s’apprend et se prépare.


Laurent Mahieu et Richard Robert

Emploi et carrières. Un tableau contrasté

Près de la moitié des cadres en activité a plus de 45 ans. Entre 2000 et 2007, les cadres seniors ont profité d’un contexte de bonne tenue du marché de l’emploi cadre et de tensions sur certains métiers ; entre 2001 et 2007, le nombre d’embauches de cadres de 50 ans et plus a quasiment doublé. Les discriminations subies par les seniors et les stéréotypes culturels auxquels on les associe en général sont structurants dans un contexte de chômage ; mais ils tendent à disparaître quand le marché du travail fonctionne mieux. La crise a remis en jeu ce rattrapage et on voit aujourd’hui se renforcer les inégalités entre ceux qui continuent à progresser et ceux qui se voient repoussés sur les marges des organisations ou du marché du travail. Se pose alors la question des actions à entreprendre : contraintes, ou incitations ?


Focus. Progrès technologique et employabilité des seniors. À propos d’un article de Sandrine Levasseur


Entretien avec Martine Flacher

L'engorgement des filièrs dans les fonctions publiques. Comprendre et agir

Si les agents des fonctions publiques ne sont théoriquement pas exposés au risque de chômage, une gestion hasardeuse des ressources humaines a conduit à l’engorgement de certaines filières et à la fragilisation des perspectives de carrière. La question démographique n’est pas seule en cause : certains choix gestionnaires n’ont pas été menés à bien et les fonctions publiques sont prises aujourd’hui entre diverses cultures. Il faudrait pouvoir offrir aux agents une véritable visibilité sur les espaces où déployer leurs compétences, en achevant de mettre en place une Gestion prévisionnelle des emplois, des effectifs et des compétences digne de ce nom. Or, la contrainte budgétaire est devenue telle qu’aujourd’hui, la GPEEC doit faire face, dans le cadre de la réforme de l’État, aux questions de réorganisation des services et de réduction du format de la fonction publique.


Focus. Les incitations des entreprises. Négociations, accords, plans d’action


Entretien avec Guillaume Huyez-Levrat et Nicole Raoult

Négocier sur l’emploi des seniors. Le difficile passage des paroles aux actes

Les différentes actions engagées en faveur de l’emploi des seniors tardent à produire leurs effets. Le décret du 20 mai dernier peut-il changer la donne ? Un bref retour sur les pratiques en vigueur et sur les évolutions qui ont précédé ce décret peut permettre d’apprécier les chances d’avancer réellement sur cette question. Certains craignent qu’en imposant la négociation et a fortiori la signature d’accords, on risque de voir se multiplier des accords purement formels, se contentant de reprendre des dispositions existantes. Une approche coercitive a ses chances dès lors qu’elle s’articule à d’autres négociations. La GPEC et le bilan d’étape professionnel sont des outils à considérer de près, mais il reste un long apprentissage collectif pour établir un minimum d’expériences significatives. Dès lors que l’on considère que l’âge est un critère illégitime pour organiser les parcours professionnels (et c’est bien l’idée sousjacente aux stratégies d’allongement des carrières qui dénonce les discriminations dont les seniors seraient les victimes) il faut être capable de dire quels sont les critères légitimes pour jouer ce rôle.


Tristan de Feuilhade

L’entretien professionnel de mi-carrière. Un rendez-vous à prendre

L’entretien professionnel, en général, et l’entretien de mi-carrière, en particulier, sont parmi les meilleurs outils pour piloter sa trajectoire. Les branches professionnelles et les entreprises ont du mal à les mettre en oeuvre. Comment faire pour institutionnaliser ce type d’entretiens qui sont un pivot pour l’employabilité des salariés à tout âge ? En attendant, c’est un rendez-vous à prendre individuellement. Pour le préparer sérieusement, on pourrait imaginer un temps dédié, pris en charge par la formation professionnelle dans le cadre du DIF par exemple. Cela permettrait de faire vivre les entretiens professionnels, avec des cadres préparés, informés, prêts à se projeter vers l’avenir. Et de mieux investir sur eux pour prouver qu’ils sont nombreux à être dynamiques, quand les entreprises y croient et les accompagnent.


Entretien avec Bernard Masingue

Risques et opportunités du tutorat. L’enjeu de la qualification

Entre maintien dans l’emploi et transmission des compétences, le tutorat fait parfois figure de solution miracle et les accords d’entreprise lui réservent presque toujours une place significative. Mais la réalité des pratiques est souvent décevante. Si les fonctions de tuteur peuvent être confiées à des seniors, il est essentiel de ne pas confondre âge et expérience. Sans sélection, sans reconnaître la nécessité d’une qualification, le fait d’être tuteur sera vite considéré comme une activité sans exigence, faute de mieux pour occuper ceux qui sont le moins productifs. La fonction et les seniors méritent mieux. Le lien entre tutorat et seniors est d’autant plus porteur d’avenir qu’il participera d’un management intergénérationnel des équipes de travail, lequel n’est qu’une composante d’un management de la diversité. Ce management intergénérationnel ne pourra se contenter de s’improviser : il demande une qualification et une responsabilisation du management et des fonctions ressources humaines. Le tutorat des seniors n’aura sa place légitime qu’inscrit dans une conception du « senior salarié comme un autre ».


Entretien avec Julie Christin

La décision de prendre sa retraite. Questions et représentations

Comment décide-t-on de prendre sa retraite, qu’est-ce qui est en jeu dans cette décision ? À partir d’une vaste série d’entretiens, Julie Christin pointe les zones de tensions vécues et formulées par lesseniors. Avec des conclusions sans appel : le sentiment précoce de fin de vie professionnelle est beaucoup plus influencé par les politiques d’entreprise que par des facteurs personnels. Et la question des transitions est essentielle : car les questions que se posent les cadres à propos de leur retraite – quel rôle social, quelle activité, quelle valeur ai-je – sont très proches de celles qu’ils se posent au sein de l’entreprise, en fin de carrière.


Monique Boutrand

Travail, retraite. Pour une transition douce et progressive

La transition travail-retraite à la française est un passage à la fois précoce, rapide et déstabilisant pour la majorité des intéressés. Le souhait précoce de sortie d’activité qui s’exprime dans nombre de situations dévoile avant tout une volonté de fuir le milieu du travail, milieu qui a souvent produit des déceptions quant à la reconnaissance et aux possibilités d’évolution de carrière. La transition demande des aménagements, éventuellement un accompagnement, à tout le moins une prise de conscience des enjeux et des difficultés. Quelques pistes apparaissent : autoriser des formes de compromis entre travail rémunéré et activités librement choisies, proposer dans l’année qui précède la retraite une forme de bilan de « potentiel retraite », permettre aux salariés s’ils le souhaitent, de rester en lien avec leur entreprise par le biais de l’Intranet par exemple, pour une transition en douceur pour le salarié et un échange utile pour l’entreprise.


  • Journal

  • Francis Ginsbourger. Ressourcer la critique de l’organisation du travail. Que nous disent les suicides professionnels ?

  • Dominique Desbois. Des pratiques sociales innovantes et tranversales à développer en pleine autonomie. Point de vue d’un militant

  • Notes de lecture