Gouvernance et compétitivité

Des leviers d'action pour sortir (autrement) de la crise

05 mar 2012

Gouvernance, formation initiale et continue des décideurs à la responsabilité sociale et sociétale, coresponsabilité en matière de prévention des risques, mobilisation de tous les acteurs pour un écrire un nouveau contrat


Comment sortir de la crise et entrer dans une nouvelle logique de développement plus raisonnable, plus responsable et par voie de conséquence plus durable ? Dans un article paru il y a deux ans jours pour jours, Jean-Paul Bouchet dresse des leviers d'action proposés par la CFDT Cadres : la gouvernance, la formation initiale et continue des décideurs à la responsabilité sociale et sociétale, la coresponsabilité en matière de prévention des risques et d’alerte, et la mobilisation de tous les acteurs pour un écrire un nouveau contrat sociétal. La formule « sortie de crise » que l’on commence à entendre passe mal. L’actualité récente nous fournit de trop nombreux exemples de leçons et d’enseignements de crises non tirés, de reconduite des mêmes réflexes, de conservation des mêmes modèles. La spéculation accrue sur les places boursières contre des Etats fragilisés a repris de plus belle. Les rémunérations de certains dirigeants de grandes entreprises sont restées démesurées. Les distributions de super bonus reprennent comme avant.

Comment sortir plus forts de cette crise, éviter que les mêmes causes ne reproduisent les mêmes effets désastreux pour tant de travailleurs et leur famille ? Examinons quatre leviers majeurs pour sortir autrement de la crise : la gouvernance, la formation initiale et continue des décideurs à la responsabilité sociale et sociétale, la coresponsabilité en matière de prévention des risques et d’alerte, et la mobilisation de tous les acteurs pour un nouveau contrat sociétal. Du micro au macro, de l’individu au collectif, du citoyen aux institutions internationales, les leviers d’une sortie de crise dans d’autres conditions sont pluriels et les parties prenantes sont multiples. Elles reposent sur la coopération, la co-construction et la contractualisation des nouvelles règles du jeu du développement et du vivre ensemble.

La crise actuelle est aussi systémique. Les systèmes de gouvernance, de prise de décision, de pilotage sont questionnés, mais pas ou peu remis en cause. La question de la conception, de la diffusion et de la propagation, de la reproduction de ces systèmes, souvent érigés au rang de modèles, avec l’appui bienveillant des grands cabinets d’audit et de conseil, mérite une attention toute particulière. Je pense par exemple aux modèles de pilotage par la valeur ajoutée actionnariale ou au lean management. Les entreprises qui se déclarent socialement responsables en parlant sans cesse de Responsabilité Sociale des Entreprises, ne sont pas encore allées au bout de l’exercice pratique de questionnement de leurs propres systèmes, de développement de la formation de leurs managers à cette responsabilité sociale. Former plutôt que licencier et préparer les reconversions par exemple, ou bien renforcer le lien entre les jeunes et les entreprises, ou encore lier les rémunérations des dirigeants à des critères sociaux et environnementaux débattus avec les représentants des salariés, comme le préconise la CFDT présenteraient de vraies solutions. L’épreuve de vérité n’a donc pas encore eu lieu. C’est pourtant là aussi un point de passage obligé à un autre modèle de croissance prenant en compte toutes les dimensions d’un développement durable. Un levier important donc d’une sortie « autrement » de la crise. La crise actuelle est donc celle de la responsabilité. Les cadres, les managers sont en première ligne dans ces situations de tensions, de dilemmes professionnels, lorsque l’injonction de faire percute une éthique personnelle et des valeurs. Quelle est leur liberté d’expression ? Disposent-ils d’un droit de retrait ou de refus, d’un droit d’alerte ?

Enfin, la crise que nous traversons est aussi une crise de sens, de finalité. Très nombreux sont les cadres qui depuis de nombreux mois, nous font part de leur mal-être au travail, de l’absence de perspectives, de « panne de sens », de manque de reconnaissance et même de respect. Ils nous disent de plus en plus souvent leur impossibilité de bien travailler, de bien faire leur métier, de fabriquer des produits ou des services de qualité, de rendre des services aux usagers, aux patients… Ils nous font part de leurs dilemmes professionnels lorsque ce qu’on leur demande de faire va à l’encontre de leurs valeurs, de leur éthique personnelle ou de la déontologie de la profession. La crise actuelle n’a fait que révéler des ressentis et des situations antérieures. Ce n’est pas le travail qui est en crise, mais ce qui fait ou défait, crée ou tue le travail. Les salariés ne demandent rien d’autre qu’à devenir ou redevenir acteurs.

 

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Télécharger l'article paru dans Crises, Cadres CFDT n°438, mars 2010