Temps et charge de travail

Le temps de travail des cadres ? Une non-question !

09 déc 2008

La quasi-totalité des cadres travaillent au forfait. Comment s'appliquent-ils aujourd'hui ? Une synthèse juridique pour y voir clair.


Les évolutions économiques, sociales et sociétales intervenues depuis la mise en place des 35 heures et des RTT nous invitent à reprendre cette question du temps de travail. Le Président de la République a remis le débat sur la table avec son slogan «Travailler plus……».

L’intrusion des technologies de la communication a complètement modifié les frontières entre la vie professionnelle et la vie privée. Nombre de cadres travaillent chez eux via Internet. Ce temps de travail n’est évidemment ni visible, ni mesurable voire même parfois dissimulé quand il s’agit de finir un projet qui a pris du retard. Dans ce contexte les expressions recueillies entre autres dans le cadre du projet "Recherche-Action" mené actuellement par la CFDT Cadres sont unanimes quelles que soient les entreprises ou administrations: «touche pas à ma RTT!». La RTT est vécue comme la juste contrepartie à un surinvestissement accepté et le symbole d’une autonomie souvent remise en cause par les contraintes professionnelles.

La représentation française du travail des cadres qui impose ces longues journées de travail, ne nous semble pas durable: comment imaginer des carrières plus longues alors que le rythme de travail actuel épuise? Ce qui importe pour les cadres, c’est de maintenir une référence collective du temps de travail, en nombre de jours annuels travaillés, en nombre de jours de RTT pour qu’au moins cette barrière soit respectée.

Cette culture des longues journées de présence sur le lieu de travail reste franco-française même si partout en Europe, sans modifier les horaires de travail, on assiste à l’augmentation de la densité du travail. Un exemple européen nous invite cependant à la vigilance, c’est celui de la Grande Bretagne, le pays de l’«opt out», où aucune référence collective n’encadre un temps de travail négocié de gré à gré. C’est le seul pays européen où les enquêtes pointent l’allongement du temps de travail pour les cadres. Preuve s’il en était besoin de l’importance d’une négociation collective dans les entreprises et d’une référence légale pour tous.

Le point sur les forfaits jours

Qui est concerné ? Les salariés qui ne suivent pas l’horaire collectif et qui disposent d’une autonomie dans l’organisation de leur emploi du temps pour l’exercice de leurs responsabilités, soit principalement les cadres (Art 3121-43). Pour 10,3 % des salariés à temps complet (soit 8,7 % de l’ensemble des salariés), le temps de travail est décompté sous forme d’un forfait en jours (*).

Un accord collectif est nécessaire Le recours aux conventions de forfaits annuels en jours est subordonné à la signature d’un accord d’entreprise ou, à défaut, de branche (Art. 3121-39 du code du Travail). Cet accord doit fixer la durée annuelle du travail applicable aux salariés concernés, durée qui ne peut excéder 218 jours (Art. 3121-44).
Les salariés en forfait jours ne sont pas soumis à la durée légale du travail de 35 heures, ni à la durée maximale de 10 heures par jour et de 48 heures par semaine (Art. 3121-48). Mais la durée de repos quotidien est de 11 heures au minimum.
Le Comité d’entreprise est consulté chaque année sur le recours aux conventions de forfait et sur les modalités de suivi de la charge de travail des salariés concernés (Art. 3121-48 II).


Bon à savoir :
Les accords en vigueur ne sont pas remis en cause, sauf révision ou dénonciation (Art. 3121-48 III).
Un salarié qui perçoit une rémunération manifestement sans rapport avec les sujétions qui lui sont imposées peut saisir le juge judiciaire afin que lui soit allouée une indemnité calculée en fonction du préjudice subi (Art. 3121-47).
Un entretien annuel individualisé est organisé par l’employeur avec chaque salarié en forfait jours. Cet entretien doit porter sur : la charge de travail, son organisation dans l’entreprise, l’articulation entre vie professionnelle et vie personnelle (et familiale), et sur la rémunération (Art. 3121-46).

Le rachat de jours de repos par le salarié La loi du 20 août 2008 pérennise un mécanisme introduit en 2005 et peu utilisé depuis. Elle dispose que « le salarié qui le souhaite peut, en accord avec son employeur, renoncer à une partie de ses jours de repos en contrepartie d’une majoration de son salaire ».

Bon à savoir :
Cet accord doit être écrit et le taux de majoration des jours de repos travaillés est de 10% au minimum.
En l’absence d’accord collectif sur le sujet, le plafond de jours travaillés est de 235 jours.

 

(*) Données à fin juin 2008. Source : Enquête trimestrielle sur l’activité et les conditions d’emploi de la main-d’œuvre (Acemo), Dares. La prochaine enquête sera publiée le 18 décembre 2008.