Responsabilité et expression

Comment les futurs cadres voient-ils l'éthique de l'entreprise ?

22 déc 2010

Un exemple avec le master Ethique et entreprise de L'Université Paris-Descartes.


Quels sujets intéressent les étudiants ? La CFDT débattait avec les étudiants de leurs projets d’étude. Vendredi 17 décembre : Les étudiants du Master « Ethique & Entreprise » présentaient les 3 thématiques en projet en vue des prochaines tables rondes. Martine Brasseur, Marc Piévic et Laurent Mahieu ont débattu avec eux pour affiner la problématique.  Voici quelques échos en attendant les tables rondes qui seront filmées et mise en ligne.

 

Thème 1 : Peut-on transposer à l’entreprise le rapport Stigiltz – Sen – Fitoussi ?

Ce rapport de la « commission sur la mesure de la performance économique et du progrès social » propose une douzaine de recommandations. Est-ce utile ? est-ce pertinent de chercher à transposer ? y a-t-il des effets négatifs ? Comment ne pas restreindre ce vaste champ à celui de la conciliation entre « bien-être et efficacité au travail» ainsi que s’intitule un autre rapport ? Aborder la question de la performance économique et du progrès social au niveau de l’entreprise impose de prendre en compte la dimension temporelle, la dimension collective et donc le débat social. En effet, l’époque est à la production d’indicateurs de progrès social ou d’indices de bien-être, par le biais de questionnaires individuels - la CFDT n’y échappe pas -  Cette démarche prend le risque de laisser la personne seule avec ses résultats et suscite des attentes.Face à la possible manipulation, l’approche éthique invite à débattre ensemble de façon itérative en vue d’une action portant tout à la fois sur l’économique et le social.

Thème 2 : peut on normer la dignité humaine ?

Les étudiants ont éclairé leur questionnement en rappelant les différentes sources philosophiques et en illustrer sur le champ juridique et le champ médical. Est-ce que la dignité humaine est l’argument ultime du refus ? est-ce que parce que le sujet serait consentant qu’une pratique n’enfreindrait pas les fondements de la dignité ? Dans le domaine médical, la préservation de la dignité des malades est au cœur des pratiques mais qu’en est il de celle des soignants ? La pratique du consentement du patient (ou des proches) se pose de plus en plus comme celle du volontariat en entreprise (cf. le Revue Droit Social de février 2010). Est-ce parce qu’un salarié est d’accord pour ne pas respecter une norme de santé que cette situation respecte la dignité humaine ?

Thème 3 : Peut-on mesurer l’éthique ?

Le principe « on n’améliore que ce que l’on mesure » est-il applicable au champ de l’éthique ? faut il ne se fier qu’au langage des chiffres ? la mesure ne porte t elle pas atteinte à la liberté ? à défaut de mesurer l’éthique peut-on être vigilant quant aux signaux d’alerte de « l’inéthique », de l’injustifiable, de l’indignité ? La norme ISO 26000 introduit la notion de « comportement éthique de l’entreprise » : si la question éthique n’est que personnelle, comment en faire une question collective ? Comment l’entreprise peut elle reconnaitre le questionnement éthique de ses salariés ? Comment dépasser le dogme de l’adhésion aux valeurs de l’entreprise pour entrer  dans un dialogue sur la façon de mettre en œuvre ces « valeurs » dans les situations concrètes de travail ? Ainsi l’injonction à l’altruisme dans le travail (sic) n’est elle pas contreproductive car elle implicite que ceci n’est pas dans l’ordre des choses du comportement humain (cf. les travaux de Norbert Alter) ? Et n’y aurait il qu’une seule façon éthique (cf. le principe de présomption de justesse adopté à la RATP) ?

Tout ceci fait bien écho à la démarche de l’initiative IRESCA, aux travaux de la CFDT Cadres sur les dilemmes professionnels, aux questionnements des cadres CFDT cherchant à concilier responsabilité managériale et valeurs CFDT. On attend la suite des débats avec intérêt.